Après une année 2023 plutôt calme, l’année 2024 voit s’accroître à vitesse « grand V » les prédations sur les bovins dans notre région. On recense officiellement 5 meutes qui évoluent dans et autour de La Vallée, toutes ont eu un ou plusieurs louveteaux cette année, lesquelles ont un très gros taux de survie étant donné la profusion de nourriture ainsi que des hivers plutôt cléments ces dernières années. Pour comparaison les louveteaux nés dans le grand nord canadien ou dans des régions plus arides sur la planète ont un taux de survie nettement inférieur ce qui rend l’expansion de l’espèce plus compliquée.
Voici un inventaire des attaques sur bovins dans la région depuis le début de la saison d’alpage 2024 :
– 27 mai : 1 génisse morte Gd-Croset Dessous
– 2 juin : 1 génisse morte Sapelet Dessous, L’Abbaye
– 19 juin : 1 génisse morte Petit-Cunay
– 25 juin : 1 veau mort La Lande Dessus
– 28 juin : 1 veau mort Les Grandes Roches
– 30 juin : 1 veau mort La Trélasse, St-Cergue
– 13 juillet : 1 veau mort, Chalet des Plans
– 15 juillet: 1 génisse morte, Petit-Cunay
– 19 juillet : 1 génisse morte, 3 bêtes disparues, Petit Cunay
– 21 juillet : 1 génisse morte, Petit Cunay
– 28 juillet : 1 génisse morte, La Trélasse, St-Cergue
– 3 août : 1 veau mort La Dôle, St Cergue
– 4 août : 1 génisse morte, Petit Cunay
– 5 août : 1 génisse morte La Foirausaz, (Bière)
– 6 août : 1 génisse blessée Gd-Croset Dessous
– 9 août : 1 génisse morte La Gravière -(Bas-du Chenit)
– 10 août : 1 génisse gravement blessée, abattue, La Brenette, L’Abbaye
– 14 août :1 génisse gravement blessée, abattue, Les Piguet-Dessus
– 14 août : 1 génisse morte Les Croisettes, Les Bioux
– 21 août : 1 génisse gravement blessée, abattue, les Grands-Esserts, Les Bioux
– 24 août : 1 génisse morte Les Grands-Esserts, Les Bioux
– 25 août : 1 génisse morte, La pièce aux Reymond, Les Bioux
– 28 août : 1 génisse blessée, la Sèche de Gimel
– 29 août : 1 veau mort, Le Sollier, St-Cergue
– 31 août : 1 veau mort, Couvaloup de Crans, St-Cergue
– 4 septembre: 1 veau mort, Pré de St-Livres
– 4 septembre : 2 génisses mortes, alpage du Mt-Tendre
– 8 septembre: 1 veau mort, alpage de La Trélasse, St-Cergue
– 9 septembre: 1 veau mort, Chalet de la Dôle
Après ce triste inventaire plusieurs constats sont à faire, déjà on se rend compte que tous les pro-loups et autres professeurs en tout genre nous ont bien « menés en bateau ». Le loup ne s’attaque pas aux bovins, il n’y aura jamais plus de deux meutes à La Vallée, le loup a peur de l’homme, il ne s’approchera jamais des habitations, etc., etc…, toutes ces belles paroles se sont avérées complètement fausses !
Dans le même temps on nous dit également : Vous avez qu’à rentrer votre bétail pendant la nuit, prenez des chiens de protection, faites des barrières anti-loups !
Y EN A MARRE de tous ces conseils et de toutes ces théories !
Pour satisfaire aux normes de bien-être animal, nous (les éleveurs) sommes obligés de sortir nos bêtes tous les jours pendant l’hiver, et on voudrait nous les faire enfermer
toutes les nuits pendant la belle saison ! On ne met pas des bêtes à l’alpage pour les enfermer dans des chalets non adaptés, non non et non ! L’hiver est déjà bien assez long comme ça, leur place est dehors, dans la nature, c’est leur place, c’est là qu’elles sont bien.
Certains voudraient nous faire prendre des chiens de protection, là aussi c’est niet, dans le Jura c’est délicat, tous les amodiataires ou bergers qui ont pris des chiens de troupeaux finissent tôt ou tard devant les tribunaux parce que leurs chiens ont mordu un randonneur ou un cycliste ! D’autre part élever des chiens de protection convenablement est une activité qui demande certaines connaissances et aptitudes ainsi que pas mal de temps libre. Choses que tout le monde n’a pas forcément !
Reste les barrières, là aussi pas de miracle, pour le moment leur efficacité reste à prouver, ce n’est valable que pour une certaine catégorie d’animaux et c’est bien joli quand le temps est au sec mais quand il pleut régulièrement des cordes et que les animaux sont toutes les nuits au même endroit, ceux-ci vont rapidement se retrouver dans un sacré bourbier ! (bonjour le bien-être animal !) De plus ces barrières fort coûteuses en espèces et en maintenance sont délicates à mettre en place. Pour garantir une bonne efficacité (1er fil à 20 cm du sol) cela nécessite quelques aménagements de terrain qui essuient bien souvent des contestations voire carrément des refus de la part des services de la protection de la nature tant ces gens sont bornés quant à l’idée même de déplacer deux ou trois cailloux, c’est compliqué ! Mais il ne faut pas se faire trop d’illusions, considérant la facilité de ces chers ($) canidés à s’adapter à toutes nos mesures, ils auront vite compris qu’il leur suffit de creuser sous les fils ou de sauter par-dessus pour accéder à leur repas préféré !
Récemment on a pu voire un éleveur Combier exposer, pendu à un chargeur frontal, un cadavre de génisse dévorée au bord de la route cantonale, cela peut choquer certains mais cela témoigne du grand désarroi dans lequel le monde agricole se trouve. Cette action choc et symbolique ne coûte rien, ne dégrade rien et ne porte atteinte à personne. Je trouve que c’est une bonne manière de sensibiliser la population aux conséquences du comportement des loups. Il est facile de s’émerveiller du retour des loups depuis son salon, mais il faut aussi accepter de voir les conséquences et la réalité du terrain.
Voilà on en est là aujourd’hui,
5 meutes évoluent désormais dans notre région, aucune mesure de protection des troupeaux ne semble vraiment efficace. Que va-t-on faire maintenant ? Rien et continuer à compter les cadavres ? Une chose est sûre, si rien n’est entrepris rapidement, La Vallée comptera bientôt dix meutes ! Amis randonneurs et champignonneurs il est temps à l’avenir de vous équiper d’un bon « choton » pour pratiquer votre activité préférée.
L. Berney
Agriculteur, Le Brassus