Concerne l’interview accordée par le quotidien Le Temps à M. Ramon Esteve, président de Swiss Trading and Shipping Association du 30 novembre.
A croire cet affairiste impénitent qui, avec une désinvolture affichée, nous balance à la figure son déni des réalités et son effrayante mauvaise foi, toutes les multinationales, y compris celles incriminées par la récente initiative populaire, seraient des parangons de respect et d’humanité. Les initiants, quant à eux, font figure d’idéalistes dangereux, acharnés à la perte des PME. A une époque cruciale, la nôtre, où des décisions majeures et difficiles devraient pouvoir être prises, les visionnaires du changement sont blackboulés par les extrémistes du dollar.
Au début de l’interview qui s’est déroulée juste après les résultats du scrutin, M. Esteve avoue avoir dû évacuer la pression en faisant un tour à vélo. L’aspect sportif est plaisant, mais l’enjeu des votations, loin de lui paraître anodin comme il l’affirmera par la suite, faisait bien planer une véritable menace sur l’économie faîtière de négoce dont il est président et il en était conscient. Ce n’est pas pour rien non plus qu’Economie-Suisse a investi autant d’argent pour une campagne publicitaire qui s’est révélée la plus chère de l’histoire avec 18 millions de francs dépensés.
Pour en revenir à M. Esteve, avec des arguments tendancieux dont il paraît coutumier, il dénonce une manœuvre détournée des initiants pour contrôler totalement l’économie et taxe l’initiative de futile et onéreuse. Onéreuse, je l’admets, mais futile, alors qu’elle a déchaîné les passions, qu’elle a été portée sur les ailes de la justice et de la fraternité humaine, fécondée d’ailleurs par ses propres ressources, c’est une insulte.
Le discours s’enlise ensuite sur le déficit d’image dont souffriraient les multinationales en Suisse, et pour lesquelles le remède serait une meilleure traçabilité des produits. On ne saurait pervertir la vérité avec plus d’efficacité en substituant aux problèmes cruciaux d’éthique des normes de sécurité alimentaire, d’origine et de garantie, à notre profit.
Enfin, à la question des exigences requises par le contre-projet, avec un aplomb définitif, M. Ramon Esteve n’y voit rien de grave si ce n’est un surplus de paperasse. Sur ce point-là, du moins, on peut lui faire entièrement confiance!
Danielle Berger,
L’Orient
P.S.: Mes vifs remerciements à tous les correspondants qui ont pris la plume pour soutenir l’initiative.