De 2014 à 2018, la Suisse et l’UE ont négocié un accord-cadre institutionnel permettant d’appliquer de façon plus homogène et efficace les accords portant sur l’accès au marché.
Depuis 2013, l’Union syndicale suisse («USS») a clairement exprimé au Conseil fédéral sa ligne rouge: ne pas remettre en question les seuls outils de protection des salaires suisses prévus par les mesures d’accompagnement.
Néanmoins, l’accord-cadre tel que négocié constitue une menace claire pour les salaires et les emplois en Suisse.
Au-delà de l’abaissement de la règle des 8 jours en 4 jours obligeant toute entreprise étrangère d’annoncer aux autorités ses travailleurs détachés en Suisse durant une période limitée, l’accord-cadre impose l’exécution de certaines directives de l’UE beaucoup plus restrictives en ce qui concerne l’activité de contrôle des conditions de travail, avec pour arbitre la Cour de justice de l’Union européenne («CJUE»).
Cette vision libérale du marché du travail est celle prônée par la Commission européenne qui considère, aujourd’hui, nos mesures d’accompagnement comme de prétendues entraves disproportionnées pour le marché, alors que cette même Commission avait un regard tout autre lorsque celles-ci furent négociées pour les Bilatérales II en 2004.
Au vu de ce précède, les formations politiques et patronales qualifiant les opposants à l’accord-cadre d’être anti-européen occultent totalement l’enjeu fondamental de ce débat sur l’accord-cadre: c’est bien la protection des salaires de l’ensemble des travailleurs que compte notre pays qui est en jeu, à partir du moment où dit accord met à mal les mesures de contrôles dans un pays comptant des salaires les plus élevés de l’UE.
De plus, dit accord s’attaque non seulement aux mesures d’accompagnement, mais il pourrait s’attaquer directement aux outils de contrôle des conditions de travail de notre droit interne prévu au sein de conventions collectives de travail dont l’existence est bien antérieure aux Bilatérales II.
En définitive, le débat porté par l’accord-cadre est d’ordre social et s’inscrit explicitement dans celui qui oppose patronat/syndicat sur le renforcement de la protection des travailleur.se.s,
dont l’UDC a démontré maintes fois qu’elle défendait les intérêts patronaux.
Au demeurant, les organisations syndicales européennes et partis politiques de gauche européens soutiennent activement la position de l’USS, bien conscients des méfaits des directives sur la protection des salaires, ne serait-ce qu’en Allemagne où l’engagement croissant d’entreprises sous-traitantes étrangères bon marché, dans le secteur de la construction par exemple, a généré de nombreux problèmes sur le contrôle des salaires et la mise à l’amende des sociétés fraudeuses.
Aller dans le sens de l’accord-cadre tel que négocié, ne ferait que précariser les travailleur.se.s dans un marché du travail déjà très concurrentiel.
Nicolas Rochat Fernandez,
Conseiller national PS