Un mot fort qui vient à l’esprit en pensant à l’année écoulée est «retournement». Nous avons en effet assisté à plusieurs scénarios de renversements en 2017, la plupart du temps, fort heureusement, dans le sens positif du terme.
Chez nos voisins français, lors des élections présidentielles et législatives d’abord. Un très jeune candidat, sans le soutien d’un parti «gouvernemental», gagne l’élection présidentielle; puis, à partir de son comité de campagne, il crée un parti politique et gagne quelques semaines plus tard les élections législatives. Huit mois plus tard, la dynamique est toujours là et la France renforce sa position de co-leader d’une Europe qui semblait un peu à bout de souffle après le Brexit.
Autre retournement, chez nous en Suisse, la ville de Moutier rejoint le Jura. Economiquement, ce n’est pas vraiment significatif mais dans une région politiquement chahutée depuis les années 60, c’est une décision symboliquement forte. Le résultat des urnes, là aussi, démontre une volonté de changement.
Economiquement, et la Vallée de Joux est évidemment très concernée, 2017 aura marqué la fin d’une chute ininterrompue depuis plus de 2 ans des exportations de montres suisses. Un renversement marqué, à l’image aussi de l’affaiblissement du franc suisse contre l’Euro et des performances très positives des marchés boursiers mondiaux après une année 2016 négative.
Dernier retournement, dans le domaine bancaire, l’échange automatique des données entré en vigueur le 1er janvier 2017. Plus de 100 états, dont la Suisse, ont déclaré vouloir adopter cette norme. La mise en place en 2017 concerne 38 états déjà, dont ceux de l’Union Européenne, zone de résidence de nombreux clients de notre établissement. Comme toute banque suisse située en zone frontalière, nous avons une clientèle étrangère importante dont nous pouvions craindre la réaction mais les fermetures de comptes n’ont finalement pas eu d’incidence significative sur le niveau moyen de nos liquidités. A relever que le secret bancaire reste préservé pour les clients suisses domiciliés en Suisse.
Bilan
A fin 2017, le total du bilan est pratiquement stable (+ 0.2% par rapport au 31.12.2016). Cette faible progression ne traduit cependant pas la réalité de l’activité de la banque, puisque les hypothèques augmentent de 2.8%. Par ailleurs, au passif, les dépôts sous forme d’épargne croissent aussi (+ 2.3%). En définitive, la taille du bilan a été influencée principalement par la diminution des obligations de caisse, lesquelles ont à nouveau souffert de taux de rémunération très bas, ainsi que par notre décision de ne pas renouveler une tranche de CHF 1.5 mio d’emprunt auprès de la Banque des Lettres de Gage.
Au 31.12.2017, nos liquidités sont largement supérieures au minimum exigible, alors que nos fonds propres atteignent plus de 250% des exigences légales en la matière. La situation financière de la banque est donc parfaitement saine.
Nous poursuivons depuis longtemps un objectif ambitieux de renforcement de nos fonds propres dans le but d’assurer la pérennité de notre établissement. Pour ce faire, nous avons consolidé en priorité les réserves par le passé. Un palier important a été atteint en 2017, raison pour laquelle il est proposé à l’assemblée générale un relèvement du dividende. Nous n’abandonnons pas pour autant notre stratégie de consolidation des fonds propres. Mais, proportionnellement parlant, et sous réserve des résultats futurs, il y sera désormais consacré une part du bénéfice disponible à peine moins importante que par le passé.
Compte de résultat
La stagnation des taux bas s’est prolongée en 2017 et les renouvellements de prêts à taux fixes à des taux généralement plus bas que ceux accordés précédemment, ont engendré une légère diminution de nos revenus et finalement du résultat brut des opérations d’intérêts. Des charges d’exploitation sensiblement comparables à l’exercice antérieur mais des dotations aux provisions et correctifs de valeurs supérieures, expliquent la diminution du résultat opérationnel.
A contrario, les produits hors exploitation supérieurs de CHF 96’000.00 par rapport à l’exercice antérieur nous permettent de poursuivre notre politique de renforcement de nos fonds propres en attribuant CHF 450’000 à la réserve pour risques bancaires généraux. Le bénéfice net de CHF 525’000, en recul de CHF 45’000, est en phase avec la diminution des revenus d’intérêts.
Perspectives 2018
Corollaire d’une économie plus dynamique que ces dernières années, l’inflation va probablement faire son retour et les taux devraient augmenter, mais pas avant le dernier trimestre selon certains économistes. Nos actifs (prêts à la clientèle) étant majoritairement assortis de taux fixes et leur financement majoritairement basé sur des taux variables, nous allons enregistrer une baisse de rentabilité dès que la hausse s’enclenchera.
D’autre part, les risques géopolitiques ne sont pas à négliger. La montée du populisme dans de nombreux pays, de l’Est comme de l’Ouest, et l’imprévisibilité des leaders américains et nord-coréens sont des menaces. Par ailleurs les tensions extrêmes au Moyen-Orient entre l’Arabie Saoudite et l’Iran d’une part, ainsi qu’autour du conflit syrien, sont autant de facteurs potentiellement déstabilisants.
Pour le reste, un franc suisse un peu plus faible par rapport à certaines devises, une consommation en reprise et des taux de chômage en régression sont autant de facteurs positifs à prendre aussi en considération.
Les économistes tablant sur un taux de croissance du PIB autour de 2% pour la Suisse, les Etats-Unis et la zone euro, nous visons une progression du volume de nos affaires du même ordre de grandeur, avec une rentabilité cependant légèrement inférieure à celle de cette année.
Pierre Dubois
Président du Conseil d’Administration